Les actions chinoises au plus bas

Dans cette édition : Mauvais temps pour les actions chinoises • Réunion de la BCE • Le cours des matières premières se stabilise, mais pas pour l’électricité

Ludonomics
4 min ⋅ 10/09/2024

Bonjour, et bienvenue dans Ludonomics, la newsletter sur ce qui fait bouger l’économie mondiale. Je suis Ludovic Subran, chef économiste de l’assureur Allianz. Je vous donne rendez-vous toutes les semaines dans votre boîte mail. Suivez-moi également sur X.


FYI

NUAGES • Les bourses chinoises sont au milieu d’une tempête économique et géopolitique qui mine la confiance des investisseurs.

  • En Chine, la relance post-Covid n’a pas été à la hauteur des attentes. La croissance a atteint 5,2 % en 2023 mais la reprise a été plus fragile qu’attendu. Au deuxième trimestre de 2024, la croissance a atteint 4,7 %, soit un rythme inférieur aux 5,3 % observés au premier trimestre. 

  • La crise immobilière y est pour quelque chose — les mesures de soutien du gouvernement peinent à revigorer ce secteur à bout de souffle.

  • Une éclaircie cependant : les exportations restent élevées, augmentant de 8,7 % — plus qu’attendu — en août. Mais le niveau de demande intérieure reste chancelant : il a augmenté de seulement 3,4% au deuxième trimestre 2024, après des hausses successives de 4,9% au semestre précédent et 4,7% en moyenne en 2023.

Le policy-mix chinois, c’est-à-dire combinaison de la politique monétaire et de la politique budgétaire, est accommodant mais il ne permet pour l’instant pas de stabiliser l’économie.

CONFIANCE • Ce contexte macroéconomique mine la confiance des investisseurs, déjà ébranlée par les tensions commerciales avec les Etats-Unis. Résultat : 1) une fuite des capitaux et 2) des investissements étrangers à la baisse.

  • Depuis juin 2024, la fuite des capitaux a atteint 12 milliards de dollars, inversant la tendance positive du début d’année. Mauvais temps pour les actions chinoises.

  • Conséquence : les flux nets de capitaux sur l’année sont actuellement négatifs. Si la tendance se confirme, l’année 2024 pourrait être la première année de fuite des capitaux nette depuis 2014.

INFORMATION • Depuis plusieurs mois, le Parti communiste chinois (PCC) mène une campagne de censure particulièrement vigoureuse contre les économistes, statisticiens, analystes financiers, banques d’investissement et même les influenceurs. 

L’objectif ? Tenter de cacher les difficultés économiques du pays en supprimant les publications qui dépeignent l’économie chinoise sous un angle peu flatteur. Les articles qui mettent en lumière les difficultés économiques de la population subissent le même sort.

Les autorités chinoises ont toujours surveillé les contenus en ligne sur l’économie chinoise, mais les moyens actuellement déployés sont particulièrement importants, si bien qu’il est parfois difficile d’obtenir des données fiables sur l’économie du pays. 

Afin de limiter la fuite des capitaux, les autorités chinoises ont notamment imposé des restrictions sur l’accès aux données journalières d’investissement étrangers en Chine. Le Stock Connect — le canal d'investissement transfrontalier qui relie la Bourse de Shanghai et la Bourse de Hong Kong — ne publie ses données plus que de manière trimestrielle.

CONTRE-PRODUCTIF • Ces restrictions pourraient s’avérer, au moins en partie, contre-productives. Le manque de transparence va probablement renforcer l’inquiétude des investisseurs.

Additionnés, le ralentissement de l’économie, l’incertitude sur le market bottom (c’est-à-dire le niveau le plus bas les cours peuvent atteindre), le manque d’efficacité des politiques économiques, et l’opacité des marchés, incitent les investisseurs à exclure la Chine de leur portefeuilles marchés émergents.

ENTREPRISES • En parallèle, la croissance des entreprises chinoises est enrayée.

  • Au deuxième semestre 2024, 50% des entreprises n’ont pas atteint leurs objectifs en matière de revenus et de profits.

  • Cette tendance persiste depuis 2023 et a conduit les analystes à revoir successivement à la baisse leurs prévisions de revenus et de profits. Le semestre passé confirme la tendance, qui touche des secteurs pourtant dynamiques sur la scène internationale comme les technologies de l’information et de la communication.

LA SUITE • Pour autant, on s’attend à ce que les revenus et profits remontent en 2025 et 2026, grâce à une économie plus stable et aux effets à long terme des politiques économiques chinoises. La Banque populaire de Chine (BPC) devrait à nouveau baisser les taux directeurs au dernier trimestre de 2024.


ICYMI

BCE • La Banque centrale européenne se réunit le 12 septembre pour une réunion de politique monétaire. 

  • Les marchés anticipent une baisse des taux de l’ordre de 0,25% (25 bps) à 3,50%. 

  • Il s’agirait de la deuxième baisse de taux depuis juin — les taux étaient alors à 4,0%. La BCE a décidé de laisser passer un tour en juillet, en raison de la persistance d’une inflation élevée dans le secteur des services. 

  • L’inflation est tombée à 2,2% en août (en glissement annuel) —  le plus bas depuis 2021 — permet à la BCE de continuer dans sa baisse des taux. Attention toutefois : l’inflation dans les services reste élevée, à 4,2% (en glissement annuel).

  • On s’attend à une autre baisse des taux de la BCE d’ici la fin de l’année. On devrait atteindre des taux directeurs à 2,5% d’ici la mi-2025. 

  • La semaine prochaine, on s’attend à ce que la Fed baisse les taux aux Etats Unis.    

MATIÈRES PREMIÈRES • Le cours des matières premières a causé de nombreuses frayeurs dans le monde. Mais celles-ci ont globalement retrouvé un cours normal.

  • Du côté des matières premières dont le cours est revenu à la norme : les céréales (maïs, blé, etc), le pétrole ou les métaux. Côté céréales, la production s’est redressée. S’il s’agit d’une mauvaise nouvelle pour les agriculteurs, la chute des prix de telles denrées agricoles est un véritable soulagement pour de nombreux pays. 

  • Le café ou le cacao sont encore en surchauffe, mais les risques de contagion inflationniste sont plus limités pour ces matières premières. Pour le café comme le cacao, des récoltes décevantes expliquent le maintien de prix élevés.

  • Côté pétrole et métaux, c’est une demande en baisse qui a contribué à la modération des cours. L'OPEP+ doit gérer la baisse du prix du pétrole, qui est passé sous les $75/baril début septembre (versus $85/baril au S1 2024). La demande en berne est liée notamment à une baisse des importations en Chine et à une hausse des stocks en raison des tensions au Moyen Orient. 

  • Le gaz naturel s'échangeait cet été à €25/MWh, son plus bas niveau depuis 2021 (et seulement 25% de plus qu’au début de la pandémie). Les prix ont augmenté depuis et sont autour de €35/MWh, en raison de retards dans la livraison de LNG, de travaux prévus en Norvège, et des prévisions météo. Cependant, les stocks européens sont à 91-92% pleins. 


Lectures de la semaine

  • Retour dans le Financial Times sur les annonces faites par Mario Draghi, qui a dévoilé son rapport commandé par Ursula von der Leyen. C’est à lire ici.  

  • Pour Bloomberg, Jonathan Levin revient sur l’effet probable de baisses de taux sur les étudiants et les chômeurs aux Etats Unis. A lire ici.

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Par Ludovic Subran

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