Hausse de l’impôt sur les sociétés en France : plus de peur que de mal

Dans cette édition, l'IS en France, le salon de l'automobile, et la relance en Chine.

Ludonomics
4 min ⋅ 23/10/2024

Bonjour, et bienvenue dans Ludonomics, la newsletter sur ce qui fait bouger l’économie mondiale. Je suis Ludovic Subran, chef économiste de l’assureur Allianz. Je vous donne rendez-vous toutes les semaines dans votre boîte mail. Suivez-moi également sur X.


Hausse de l’IS en France : plus de peur que de mal

Après être progressivement passé à 25 % en 2022 (contre 33 % en 2017), le taux d'imposition des sociétés en France s’apprête à repartir à la hausse.

CONTEXTE Face à l’important déficit budgétaire, le nouveau gouvernement prévoit d'augmenter le taux d'imposition à 30,15 % pour les entreprises dont le chiffre d'affaires est compris entre 1 et 3 milliards d'euros, et à 35,3 % pour celles dont le chiffre d'affaires est supérieur à 3 milliards d'euros. Ces augmentations sont censées être temporaires, avec une réduction de moitié d'ici 2026 et une élimination complète d'ici 2027.

CONSEQUENCES Selon nos estimations, les hausses d'impôts auront un impact limité sur les marchés actions français, car les plus gros contribuables en France sont des entreprises de petite et moyenne capitalisation dont le chiffre d'affaires n'excède généralement pas 1 milliard d'euros.

L’impact sur les revenus des entreprises dépendra du montant d’impôt qu’elles paient en France : pour les entreprises du CAC 40, qui ne réalisent qu'environ 10 à 20 % de leur chiffre d'affaires en France, l'impact sur le bénéfice net est estimé à environ 2,0 % en 2025 et 1,2 % en 2026 si l'on ne considère que leurs activités en France.

PME La situation change considérablement pour les entreprises de tailles moyenne et petite, qui dépendent davantage des revenus domestiques – 45 % pour les entreprises du CAC Mid et jusqu'à 65 % pour celles du CAC Small.

Cependant, leurs bénéfices ne devraient pas être fortement affectés par les nouveaux taux d'imposition, car ces entreprises ne dépassent généralement pas 1 milliard d'euros de chiffre d'affaires annuel, seuil à partir duquel les taux d'imposition augmentent.

Environ 90 % des entreprises du CAC 40 seront touchées par le nouveau régime fiscal d'ici fin 2024, contre seulement 46 % des entreprises du CAC Mid et 5 % de celles du CAC Small.

L’impact estimé de la réforme est donc une réduction des bénéfices des entreprises du CAC 40 de -2% en 2025, puis de -1% en 2026. Plus précisément, cet impact serait de -3,5% en 2025 et -2,5% en 2026 pour les entreprises qualifiées du CAC MID (46%), et de -3,8 % en 2025, puis -4,4 % en 2026 pour les entreprises plus petites (5 % de l'indice CAC Small).

Avec une prévision de croissance de 6 % pour les actions françaises en 2025 et 2026, l'impact du nouveau taux d'imposition sur les prix du marché sera minime et n'affectera pas significativement les attentes de rendement pour ces années.


ICYMI

Salon de l'automobile de Paris

Les ventes mondiales de voitures stagnent en raison de l’essoufflement de la demande accumulée après la pandémie, notamment aux États-Unis et en Europe, où les consommateurs sont affectés par la hausse des prix du carburant et des conditions de crédit serrées.

En août 2024, les ventes de véhicules légers ont baissé de 18,3 % en Europe. Nous prévoyons que les ventes mondiales de voitures clôtureront l'année avec une augmentation de +2 %, mais cela représente un net ralentissement par rapport à la croissance de +10,8 % observée en 2023.

Les ventes de véhicules électriques (VE) sont le seul point positif, sauf en Allemagne. Depuis janvier, les ventes de véhicules électriques à batterie et hybrides rechargeables ont augmenté de +22 % par rapport à 2023. La croissance des VE ralentit dans des marchés clés comme les États-Unis et l'Europe, en raison de la baisse des subventions, des coûts initiaux élevés et d'une infrastructure de recharge limitée. En Allemagne, les ventes de VE diminuent même, car la demande pour les voitures thermiques chute fortement et les VE ne compensent pas encore cette baisse.

La baisse des ventes de véhicules électriques (VE) souligne la nécessité pour l'industrie automobile allemande de repenser son modèle économique. Bien que l'Allemagne ait prospéré en exportant massivement ses voitures à moteur thermique, la transition vers les VE pose des défis majeurs, notamment face à la concurrence chinoise et au protectionnisme croissant des Etats-Unis. Pour rester compétitive, l'Allemagne devra donc renforcer sa chaîne d'approvisionnement en batteries, investir dans les logiciels et technologies avancées, et capitaliser sur son segment premium.

Enfin, les normes démissions européennes pourraient coûter jusqu'à 16 milliards d'euros aux constructeurs allemands. Le secteur automobile, en retard dans la transition vers les véhicules électriques, demande un report des objectifs de 2025 et 2035. La France et l'Allemagne font également pression sur la Commission pour revoir ces objectifs ou les sanctions associées.


Chine — les politiques de relance doivent encore porter leurs fruits

Les récentes données montrent un ralentissement économique persistant, avec une faible croissance du crédit et des exportations décevantes, en partie à cause des typhons. Les revenus issus du tourisme restent inférieurs aux niveaux de 2019 malgré une augmentation des voyages. L'inflation peine à rebondir, et le PIB du T3 a ralenti à +4,6% (en glissement annuel), contre +4,7% au deuxième trimestre, soulignant la nécessité d'un soutien accru pour atteindre l'objectif de croissance de +5% en 2024.

En réponse, la Chine intensifie son soutien politique au T4. L'assouplissement monétaire mis en place par la Banque populaire de Chine (PBOC) a temporairement renforcé la confiance des marchés boursiers, avec une hausse de plus de 25 % des marchés onshore et offshore après l'annonce du super paquet de mesures fin septembre. Une facilité de swap de 500 milliards de RMB pour les investissements en actions a encouragé les investissements à effet de levier, tandis que le rendement des obligations d'État à 10 ans a diminué et que celui des dividendes des actions a augmenté.

Cependant, ces gains doivent être associés à une amélioration des perspectives économiques, qui ne sont pas encore visibles. Jusqu'à présent, l'assouplissement monétaire n'a pas réussi à inverser le ralentissement du crédit et de la demande intérieure, les marchés attendent donc des mesures supplémentaires. L'absence de détails sur les mesures budgétaires a conduit à une volatilité accrue, qui devrait perdurer.

La politique budgétaire doit jouer un rôle clé pour une reprise durable de la croissance en Chine, notamment en stabilisant les prix de l’immobilier et en restaurant la confiance. Les gouvernements locaux doivent compléter leur quota annuel d'émission d'obligations spéciales d'ici fin octobre, et des fonds non utilisés seront dépensés d'ici la fin de l'année.

On s'attend également à un déficit budgétaire plus large et à un quota accru pour les obligations à très long terme. La mise en œuvre du plan de relance budgétaire permettrait à la Chine d'atteindre son objectif de croissance pour 2024 et pourrait augmenter la croissance de 2025 jusqu'à +0,4 pp s’il est poursuivi en 2025.


Merci à Philippine Renaudie pour la préparation de cette édition. On vous retrouve la semaine prochaine.

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Par Ludovic Subran

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