Bonjour, et bienvenue dans Ludonomics, la newsletter sur ce qui fait bouger l’économie mondiale. Je suis Ludovic Subran, chef économiste et CIO de l’assureur Allianz. Je vous donne rendez-vous toutes les semaines dans votre boîte mail. Suivez-moi également sur X.
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Le plan d’action de Trump
Depuis son investiture, le président Trump a signé une série de décrets concrétisant certaines priorités de campagne, notamment le retrait des États-Unis des Accords de Paris et de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
La question de l’immigration, légale ou illégale, demeure un axe majeur de son programme. Dix décrets ont été signés sur ce sujet, avec un objectif de 500 000 expulsions par an, soit deux fois plus qu’à l’ère Obama et dix fois plus que les 50 000 annuelles observées depuis 2021.
Cela pourrait sérieusement affecter la dynamique démographique du pays, surtout au moment où le taux de natalité est en déclin. La croissance démographique, estimée à 3,4 millions de personnes par an, pourrait chuter à 0,5 million par an d'ici 2027, avec des conséquences sur la main-d'œuvre et la croissance économique.
L’augmentation des droits de douane, en particulier sur les produits chinois, est l’une des promesses phares de Trump. La première hausse, prévue pour le 1er février, devrait atteindre 10 %.
L’option de porter les droits de douane à 25 % pour des partenaires comme le Canada, le Mexique ou l’Union européenne reste peu probable, car cela pourrait perturber les chaînes d'approvisionnement.
Les politiques énergétiques et environnementales sont également un axe majeur de l’agenda de Trump. Son retrait des Accords de Paris et la déclaration d’un état d’urgence énergétique ont facilité l’abandon des interdictions de forage et l’octroi de nouveaux permis d’exploitation. L’administration Trump a également démantelé certaines régulations environnementales et sur l’intelligence artificielle imposées sous l’ère Biden.
L’objectif déclaré est de stimuler la croissance du PIB et de réduire l’inflation, mais plusieurs de ses mesures semblent contradictoires à cet égard.
D’un côté, les réductions d’impôts, les hausses des droits de douane et la dérégulation énergétique sont des leviers puissants pour dynamiser l’économie. Les baisses d’impôts soutiennent la consommation et l’investissement, tandis que les droits de douane, en favorisant la relocalisation industrielle, renforcent la compétitivité nationale. La dérégulation énergétique vise également à accroître l’offre en réduisant les coûts de production.
Cependant, ces mesures, combinées à la pression exercée sur la Fed pour réduire ses taux d’intérêt, pourraient alimenter des tensions inflationnistes. En effet, les baisses d’impôts et les droits de douane risquent d'augmenter les coûts de production et de stimuler la demande intérieure, entraînant une hausse des prix.
L’ajustement monétaire nécessaire pour juguler ces pressions pourrait être limité par le besoin de stimuler la croissance à court terme.
En partenariat commercial avec Inter Bev
Dans un article pour le site Agriculture Circulaire, Périco Légasse explore les bienfaits de l’élevage bovin nourri à l’herbe. En effet, les prairies fournissent non seulement une alimentation complète et équilibrée pour les bovins, mais aussi une hydratation naturelle grâce à leur haute teneur en eau végétale (jusqu’à 85 % en saison humide). L’accent est donc mis sur l’utilisation réduite des ressources en eau et la qualité de la viande produite. C’est à lire ici.
ICYMI
Banques centrales : 1,2,3 Soleil !
Les jours à venir seront riches en annonces pour les banques centrales, chacune adoptant des trajectoires différentes face aux défis économiques actuels.
En ce qui concerne la Fed, après trois baisses successives à la fin de 2024, le cycle de réduction des taux devrait se clore en 2025 avec une dernière coupe de 25 points de base en mars, portant le taux à 4-4,25 %.
Cette décision résulte en grande partie des politiques économiques adoptées par l’administration Trump, qui, bien qu'ayant des objectifs de croissance, ne semblent pas encourager la réduction de l’inflation de manière significative. L’inflation devrait ainsi rester au-dessus de l’objectif fixé par la Fed, et une nouvelle réduction des taux risquerait de raviver les pressions inflationnistes.
De son côté, la BCE poursuivra son cycle de réduction des taux. Dès le 30 janvier, elle devrait abaisser son taux de dépôt de 25 points de base à 2,75 %. D’autres baisses devraient suivre toutes les deux réunions, permettant d’atteindre un taux terminal de 2 % d’ici juin 2025.
La BoE devrait suivre également cette trajectoire, mais de manière plus graduelle. Une première baisse de 25 points de base est attendue le 6 février, suivie de baisses tous les deux mois jusqu’au troisième trimestre 2025. Cette approche mesurée vise à soutenir l’activité économique sans raviver une inflation persistante.
Enfin, la BoJ, qui avait déjà annoncé son intention de relever ses taux, a effectivement procédé à une hausse de 25 points de base ce vendredi, atteignant 0,5 %, le taux le plus élevé depuis 17 ans, conformément aux attentes du marché.
La Chine : un surplus commercial glissant pour l’année du Serpent
La Chine clôture l’année du Dragon avec un excédent commercial proche du milliard de dollars, en grande partie alimenté par une anticipation des conséquences d’une possible guerre commerciale avec les États-Unis.
Bien que la situation ne soit pas encore totalement claire, la Chine pourrait voir ses exportations chuter de 22 à 57 milliards de dollars d'ici 2026-2027, dans le cadre d'un scénario de « guerre commerciale contenue ».
Ce scénario semble le plus probable, car la hausse des droits de douane prévue pour le 1er février devrait se limiter à 10 %, bien en deçà des 60 % souvent évoqués lors de la campagne présidentielle américaine.
Si la question de savoir si Trump appliquera une taxe douanière à un taux terminal de 10 % ou une augmentation de 10 points de base sur le taux actuel reste floue, il est clair que cet ajustement serait moins sévère que nos prédictions les plus négatives.
Dans le scénario le plus optimiste, la croissance chinoise devrait être affectée à hauteur de -0,1 point de pourcentage en 2025 et 2026. Dans un scénario intermédiaire, des baisses de -0,1 point en 2025 et -0,2 point en 2026 sont prévues. En revanche, dans le pire des cas, avec une guerre commerciale totale, le PIB chinois pourrait chuter de -0,3 point en 2025 et jusqu'à -0,7 point en 2026.
Parallèlement, les prix des exportations chinoises ont connu de fortes fluctuations récemment, une réponse des exportateurs pour maintenir leur compétitivité et sécuriser leur part de marché. Cette adaptation des prix pourrait permettre de limiter l'impact des hausses tarifaires et d'atténuer les effets négatifs sur l’économie.
Merci à Perrine Levin pour son aide dans la préparation de cette édition. On vous retrouve la semaine prochaine.