Au premier trimestre, le PIB a progressé de +0,4 % par rapport au trimestre précédent, surpassant largement les attentes.
Bonjour, et bienvenue dans Ludonomics, la newsletter sur ce qui fait bouger l’économie mondiale. Je suis Ludovic Subran, chef économiste et CIO de l’assureur Allianz. Je vous donne rendez-vous toutes les semaines dans votre boîte mail. Suivez-moi également sur X.
La zone euro a entamé 2025 sur une note solide. Au premier trimestre, le PIB a progressé de +0,4 % par rapport au trimestre précédent (contre +0,2 % au quatrième trimestre 2024), surpassant largement les attentes.
En rythme annuel, la croissance reste stable à +1,2 %, confirmant un début d'année plus dynamique que prévu.
Cette accélération est largement alimentée par la demande intérieure, notamment l'investissement et la consommation, mais aussi par une contribution positive du commerce extérieur, bien que ce facteur varie d’un pays à l’autre.
L’Allemagne, après deux ans de stagnation, enregistre enfin un léger rebond de +0,2 % au premier trimestre 2025, soutenu par une consommation privée plus solide et un retour de l’investissement.
L’Italie surprend aussi avec une croissance de +0,3 %, grâce à la demande domestique, bien que la contribution du commerce extérieur soit négative.
La France, en revanche, peine à décoller avec une modeste hausse de +0,1 %. La consommation de biens reste à l’arrêt, et les politiques publiques, comme la réduction des subventions sur les voitures, pèsent sur la confiance des consommateurs.
L’Espagne, pour sa part, conserve la meilleure performance, avec une croissance de +0,6 %, mais son rythme de progression ralentit par rapport aux trimestres précédents.
L’investissement reste un moteur clé de la reprise, mais les tensions commerciales pourraient freiner cette dynamique dans les mois à venir.
Les hausses de tarifs douaniers des États-Unis, annoncées début avril, risquent d’affecter l’activité, en particulier les exportations et l’investissement à partir du deuxième semestre.
Si la demande extérieure continue de soutenir l’économie, notamment en Allemagne et en Espagne, les pays comme l’Italie et la France pourraient ressentir davantage l’impact de ces nouvelles mesures tarifaires, exposant leurs économies à des risques plus élevés.
En ce qui concerne l’inflation, les derniers chiffres d’avril montrent une stabilité à 2,2 % pour la zone euro, inchangée par rapport à mars.
Toutefois, la dynamique sous-jacente révèle des tensions, notamment dans le secteur des services, où les prix augmentent de +3,9 % en avril (contre +3,5 % en mars). Les prix alimentaires restent élevés à +3,0 %, tandis que l’énergie continue de reculer.
En Allemagne, l’inflation baisse à +2,1 %, tandis que la France affiche une inflation relativement basse à +0,8 %.
L’Italie et l’Espagne, en revanche, connaissent des pressions plus fortes, avec des hausses respectives à 2,0 % et 2,2 %.
Dans ce contexte, la BCE pourrait opter pour un assouplissement monétaire supplémentaire, avec une possible baisse du taux directeur à 1,5 % d’ici septembre 2025, afin de soutenir la croissance face aux risques extérieurs.
Cette politique accommodante visera à amortir les effets des hausses tarifaires américaines et à maintenir la stabilité économique dans un environnement global incertain.
En résumé, bien que la zone euro connaisse une reprise plus robuste qu'attendu, les défis extérieurs, notamment les tensions commerciales, risquent d’influencer la dynamique de croissance au cours des mois à venir.
Au premier trimestre, la croissance du PIB des États-Unis a légèrement ralenti de -0,3 % en rythme annualisé, principalement en raison d'un commerce extérieur moins favorable.
Les importations ont explosé de +9 % (41,3 % annualisé) à cause du frontloading en anticipation des hausses tarifaires, tandis que les exportations n'ont augmenté que de +0,4 %.
Cette accélération des importations a concerné principalement des fournitures industrielles comme l’acier et l’aluminium, mais aussi des biens de consommation.
Après une pause en février, les importations ont de nouveau bondi en mars, en grande partie pour des biens de consommation, alors que les grossistes et consommateurs américains cherchaient à acheter avant « Libération Day »
Les données de mars et avril montrent que l'économie reste résiliente à court terme, grâce à l'anticipation des achats, mais cette dynamique commence à s'épuiser.
En mars, la production manufacturière (+0,3 %) et la consommation des ménages (+0,7 %) ont été solides, soutenant la consommation intérieure au début du deuxième trimestre. Le marché du travail reste solide avec des taux de licenciements toujours bas.
Cependant, les enquêtes sur la confiance des consommateurs et des entreprises signalent un fort ralentissement des dépenses pour les mois à venir. Les ménages américains prévoient un affaiblissement de l’économie, une hausse du chômage et une inflation plus élevée à moyen terme.
Bien que les enquêtes de sentiment puissent exagérer le ralentissement à venir, ces données prévisionnelles sont un signe d'alerte pour l’économie.
Le recul récent de l'administration Trump sur certaines hausses de tarifs, notamment concernant les pièces automobiles, pourrait améliorer le climat économique et atténuer la récession.
La Fed devrait maintenir ses taux inchangés lors de sa réunion de la semaine prochaine, mais on s'attend à une première baisse des taux en octobre.
Dans un contexte de hausses tarifaires, l’inflation devrait rapidement dépasser les 3 % d'ici juillet, alimentée par des prix plus élevés sur les produits intermédiaires et finis.
Face à l’incertitude du commerce mondial, les entreprises américaines augmentent leur inventaire de produits pour anticiper les hausses de tarifs.
Cette réaction est visible dans les données macroéconomiques : l'investissement non résidentiel a progressé de 2,3 % au premier trimestre 2025, en partie grâce à l'accélération des importations.
Parallèlement, 79 % des contrats de transport maritime international sont désormais verrouillés dans une fenêtre de 0 à 3-8 mois, soit une augmentation de 19 points par rapport à 2024.
Cela indique une volonté de privilégier l’agilité et de retarder les décisions à long terme face à la volatilité des politiques commerciales.
Toutefois, cette stratégie de stockage n’est pas homogène. Certains secteurs, comme l’habillement, les meubles et les produits en papier, sont proches de leurs capacités maximales de stockage.
Les ratios stocks/ventes atteignent les 20 % les plus élevés des dix dernières années. Ces industries, déjà bien pourvues en stocks tampons, sont réticentes à en accumuler davantage face à une demande faible et des risques importants.
Si les tarifs proposés sont instaurés, le secteur de l’habillement et des chaussures pourrait perdre entre 15 et 20 milliards USD de revenus.
D’autres secteurs, comme l’électronique, les électroménagers et l’automobile, sont également affectés. La rentabilité est faible, les stocks limités et les pressions tarifaires croissantes.
Certains pourraient connaître des baisses de bénéfices à deux chiffres en 2025 si les hausses de prix ne sont pas répercutées sur les consommateurs.
Les marques comme Shein et Temu ont déjà augmenté leurs prix de 400 %, et l’inflation aux États-Unis devrait atteindre 4,5 % cet été, avec des réserves d'importation qui s’épuisent.
Le boom des entrepôts est une tactique pour éviter les tarifs et gagner en flexibilité, mais il ne représente pas une stratégie à long terme.
Au premier trimestre 2025, les faillites de grandes entreprises (chiffre d'affaires supérieur à 50 millions d'euros) ont atteint un niveau élevé, avec plus d'une par jour.
Un total de 122 grandes entreprises ont fait faillite, soit une légère diminution par rapport au quatrième trimestre 2024 (128 cas), mais une augmentation par rapport au premier trimestre 2024 (+15 cas). Cela représente le quatrième plus grand total depuis le début du suivi en 2015.
Le chiffre d'affaires combiné des entreprises insolvables a augmenté de 7 % en glissement annuel pour atteindre 43 milliards d'euros, avec une moyenne de 352 millions d'euros par entreprise.
Ce phénomène est lié à l'incertitude économique et aux transformations structurelles dans plusieurs secteurs, dans un contexte de croissance modérée, ce qui a également contribué à la hausse des faillites des PME.
Selon nos perspectives, cette tendance pourrait se poursuivre, aggravée par les effets de la guerre commerciale. Si la tendance continue, 2025 pourrait battre un nouveau record.
L’Europe occidentale reste la région la plus touchée, avec 74 faillites majeures (+10 par rapport à 2024), devant l’Amérique du Nord (21 cas) et l’Asie (15 cas). L’Europe occidentale représente 61 % des faillites mondiales du trimestre. Les États-Unis dominent en termes de taille, avec 8 des 20 plus grandes faillites du trimestre.
Les secteurs des services et du commerce de détail sont les plus affectés, en particulier en Europe occidentale et en Amérique du Nord. Le secteur de la construction est également touché, notamment en Europe et en Asie. Les tendances sectorielles du premier trimestre 2025 sont proches de celles de 2024, avec une majorité de faillites dans les services (23 cas), le commerce de détail (21 cas) et la construction (14 cas).
Merci à Perrine Levin pour son aide dans la préparation de cette édition. On vous retrouve la semaine prochaine.